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Crise sanitaire de la covid 19 et opportunités municipales

25 Déc

Crise sanitaire de la covid 19 et opportunités municipales

La planète terre a l’habitude des menaces mortelles devenues multiples : dégradation de la biosphère, prolifération des armes nucléaires, économie déréglée, résurgence des barbaries, crise des démocraties, des démagogies triomphantes dans de grandes nations, progrès des systèmes néo-autoritaires à façade démocratique, crise générale de la pensée politique, etc. Lorsque le virus dévastateur de la covid 19 déferle dans les villes du monde, la psychose se planétarise, la peur de l’autre qui vient de l’extérieur s’accentue, les autorités politiques, pour une fois, avouent leur impuissance réactionnaire. Ce virus est révélateur des faiblesses de la mondialisation qui reposait jusque-là sur une interdépendance dénuée de solidarité. La pandémie du coronavirus a remis brutalement la science au centre de la société. On devra comprendre que les sciences n’évoluent efficacement que par les controverses, car ces controverses finissent par positionner la vérité scientifique. Le monde scientifique avait déjà d’ailleurs vécu de fortes controverses à l’apparition du sida dans les années 1980.

L’unification techno-économique de la planète, n’aura pas développé l’entente entre les peuples. Exit le mythe de l’Homme maître de son destin et de la nature. Le rêve transhumaniste s’estompe devant accidents et microbes mutants. Chaque citoyen vit l’expérience inédite du confinement dont le sens gagne en épaisseur au sein des villes. Bien que le monde ait vécu des épidémies, le confinement mondial n’a aucun précédent historique. A la relégation dans les domiciles et dans les centres hospitaliers s’ajoute la précaution face à d’inattendus décès épidémiques mondialisés. C’est une occasion de voir ainsi régénérer la notion d’humanisme.

Confinés dans leur maison à Montpellier en France, Edgar Morin, sociologue et philosophe centenaire, et son épouse Sabah Abouessalam-Morin, sociologue urbaniste, s’attachant à décrypter les ruptures, mais aussi les incertitudes, qu’induit la crise actuelle. Ils en tirent des « leçons » qui éclairent l’espoir du « monde d’après ». Ils y voient une opportunité de revivre en couple le temps rallongé, l’amour, l’échange et la poésie intimiste. Vivre à la maison est comme se retrouver dans une forteresse, protégé. Le retrait de la vie publique s’assimile à une retraite. On est affranchi du temps chronométré qu’impose le diktat du temps social, on imagine à l’intérieur de chez soi, des loisirs antidépresseurs pour échapper aux mauvaises nouvelles qui saturent les communications devenues éruptives. Edgar Morin constate que les prises de conscience demeurent lentes et tardives. Avec sa liberté de parole, il persiste sur les causes de la situation : « 1. Un mode de pensée empêchant de voir la réalité complexe, de comprendre l’incertitude dans laquelle nous sommes contraints de vivre. Pensée qui mène les spécialistes à s’isoler et ne pas collaborer. 2. Une doctrine néolibérale avide plaçant l’Argent avant l’Homme, négligeant l’avenir, générant injustices, replis nationalistes, vagues antidémocratiques. 3. La peur de parler vrai et, aggravant le tout, les collusions et la corruption ! »

Crises et chaînes de solidarité

Au sein des communes d’Afrique, la crise sanitaire du coronavirus et le confinement des populations ont suscité la prise de conscience d’une communauté de destins, bien que les peuples ne soient pas logés à la même enseigne. Ceux qui ne sont pas mis en quarantaine ressentent néanmoins un effet d’internement, d’assignation à résidence surveillée. Les rues désertes, sans « villes mortes » contestataires, donnent une autre physionomie à la ville. Les magistrats municipaux ont à gérer des crises en chaîne provoquées par la pandémie. Il faut faire face à l’impréparation, aux défaillances systémiques, aux erreurs. Les manifestations de solidarité collective apparemment disparues resurgissent, notamment chez le personnel soignant et ensuite dans les quartiers, même les plus défavorisés. On redécouvre alors la solidarité (locale, nationale et internationale) comme la seule vraie valeur sociale cosmopolitique.

Le minuscule mais terrible ennemi qu’est la covid 19 stimule l’imagination des mesures barrières, devenues en l’occurrence des mesures d’autorité, des nouveaux remèdes pour répondre à l’urgence, de la validité de tel ou tel médicament, de la durée des essais cliniques à engager… Les défunts ne peuvent plus être honorés avec faste et solennité comme à l’accoutumée, lors des enterrements désormais à la sauvette. Les survivants expient leur ressentiment dans une paradoxale communion où l’on doit respecter la distanciation sociale. Le drame actuel révèle donc une triple crise dans la perspective crisologique repérée chez Morin : crise biologique menaçant les vies, crise économique, crise de civilisation, le temps de la mobilité cédant à celui de l’immobilité obligée. La catastrophe sanitaire et le confinement aboutissent à une crise de civilisation, car ils obligent à changer de paradigme comportemental, tant au niveau local que planétaire. Mais, toute crise porte en elle un risque et une chance. Par exemple, le confinement aura favorisé le déconfinement des esprits.

Vers un engament écologique durable

Il y a pour les municipalités une opportunité de développer un engagement écologique durable et universel dont l’alerte avait été lancée par le Rapport Meadows il y a un demi-siècle. A cet effet, la mise en ligne de produits culturels (livres, spectacles, musées, films) dont l’accès gratuit pourrait améliorer la formation des citoyens serait une initiative importante. Les maires réalisent qu’il faut passer à un autre modèle économique post-covid 19 pour vivre avec l’incertitude. Autrement dit, le système fondé uniquement sur la compétitivité et la rentabilité des entreprises sans un aspect humanitaire va s’affaiblir ; la pratique du télétravail qu’engendre le confinement pourra remettre en question le fonctionnement trop hiérarchique ou autoritaires des entreprises ; la production locale est plus valorisée tout autant que le commerce de proximité, au détriment de l’industrie du jetable, du consumérisme, de la recherche effrénée des profits. On ira à l’école – plus égalitaire désormais- pour beaucoup plus apprendre à vivre qu’à reproduire : comment s’alimenter, bouger, gérer son stress ou ses émotions, vivre ensemble.

L’électrochoc Covid 19 ouvre la voie à un nouvel humanisme, une nouvelle voie politique, écologique, économique, sociale et communicationnelle. Le Plan mondial de réponse humanitaire des Nations Unies vise en ce sens à combattre le coronavirus dans les pays les plus pauvres du monde et à répondre aux besoins des personnes les plus vulnérables, là où la fragilité et les conflits annulent les progrès durement obtenus en matière de développement et entravent les perspectives d’avenir des enfants, des jeunes et des personnes les plus pauvres. Ils affaiblissent profondément les systèmes de santé et rendent les sociétés plus vulnérables aux épidémies. Parallèlement, le Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la riposte au COVID 19 et le relèvement aide les pays à revenu faible et intermédiaire à faire face à la crise provoquée par le virus sur le plan de la santé et du développement. En outre, le Fonds pour la consolidation de la paix du Secrétaire général de l’ONU continue d’apporter un soutien adapté et déterminant pour contribuer à prévenir et atténuer les risques de conflit qui risquent aujourd’hui d’être exacerbés par la pandémie. On peut évoquer la facilité COVID 19 du FIDA pour les ruraux pauvres « Rural Poor Stimulus Facility » dont l’aide est évaluée à environ 15 millions d’Euros pour les pays de l’Afrique Centrale (Cameroun, République Centrafricaine, République Démocratique du Congo).

Edgar Morin nous énonce pour l’occasion que « si l’ignorance de l’incertitude conduit à l’erreur, la certitude de l’incertitude conduit à la stratégie » Les communes ont besoin de stratégies qui parviennent tirer des leçons de la crise pour les transformer en atout partagé. Une réforme globale s’impose dès lors, du moment où on ne peut changer l’économie sans changer l’éducation et la santé. Ce sont là des ferments d’élans novateurs au sein des collectivités territoriales décentralisées.

Alain Cyr Pangop, crisologue, Villes&Communes d’Afrique

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