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LES GRANDS PROBLÈMES DU DÉVELOPPEMENT LOCAL AU CAMEROUN

6 Juin

LES GRANDS PROBLÈMES DU DÉVELOPPEMENT LOCAL AU CAMEROUN

En 1990, Jean-Marc Éla publiait Quand l’Etat pénètre en brousse…Les ripostes paysannes à la crise chez Karthala, pour « penser global et agir local »[i] Il filtre de l’étude d’Éla un constat clair : les discours sur le développement local ne sont pas récents en Afrique et au Cameroun. Déjà avec le développement autocentré, le Cameroun inaugurait une politique de développement prenant le peuple comme le principal acteur et la finalité ultime de ce développement. Avec l’idéologie le sous-tendant, le développement autocentré balisait la voie d’un développement reposant sur la participation populaire. Pour asseoir les jalons du projet, un accent particulier devait être mis sur l’importance du secteur agraire. Ce n’est donc pas le fruit du hasard si le deuxième plan quinquennal d’alors s’intitulait « le Plan Paysan » ; ce n’est non plus la providence qui fait qu’en même temps on ait créé un journal, Cameroun Agriculture (un tri mensuel,) pour accompagner ce désir de miser en priorité sur l’agriculture que le journal qualifiait déjà dans l’édito de sa première édition d’« épine dorsale de notre économie » (Janvier. Février. Mars. 1986). Le Cameroun reprenait à son compte ces propos d’un critique qui dans une édition du Monde Diplomatique déclarait qu’« une grande puissance est une puissance agricole ». Cameroun Agriculture se donnait pour mission de « suivre les diverses actions engagées pour que notre agriculture pilier de notre développement ait toujours la place qu’elle mérite ». Le président lui-même au 20 février 1987 disait «  Je demande aux Camerounais de faire de l’agriculture (…) et par les temps difficiles que nous vivons, je demande que ceux qui quittent la fonction publique ou qui sont victimes de certaines compressions de personnel se reconvertissent dans l’agriculture » (Cameroun Tribune, 20 février 1987 P.5). On se passera volontiers des comices agricoles initiés en 1973 dans ce qu’on baptisa alors du nom très expressif de « Révolution verte » mais s’attardera sur le discours d’ouverture de Paul Biya aux Comices agro-pastorales de Maroua où il déclarait «  les comices agricoles sont devenus une fête du monde rural ». À regarder de près, le PNDP, du moins dans son versant agricole, s’inscrit dans la même logique que le plan paysan de jadis. Et le journal qui l’accompagne élargit Cameroun Agriculture. Mêmes résultats que le plan paysan ?[ii] Les mécanismes de ce dispositif stratégique posent problème et instaurent un leadership non motivant et mystifié[iii]. De nos jours, le développement local est pris en charge au Cameroun par le Budget d’Investissement Public (BIP) et les financements à gestion décentralisée (PNDP, FEICOM). Avec l’annulation de la dette italienne au Cameroun on note au niveau du MINEPAT un réinvestissement dans les projets de développement en 2017[iv].

Divers moyens sont utilisés par les populations locales pour prendre part au développement de leur localité. L’organe premier d’orientation des activités partout est le comité de concertation.

A l’observation générale, les populations s’approprient le développement localau Cameroun[v]

Dans le cadre de la décentralisation aujourd’hui, le principe de subsidiarité est mis en avant, mais la société civile a le défi de développer des stratégies adéquates afin de compléter ce principe de subsidiarité. Ici, on vise précisément la capacité de la société à s’auto-organiser en dehors de l’Etat, mais avec l’appui de ce dernier. La société civile engrange un réseau de corps sociaux intermédiaires régulateurs de rapports entre les individus et l’Etat, car elle ne se réduit pas aux mouvements sociaux (spontanés et conjoncturels), puisqu’elle est constituée d’entités structurées et institutionnalisées. Les critères de représentativité et d’implantation territoriale constituent un solide gage de la légitimité des interventions de la société civile, comme le relève Jeann Claire Mebu (2007). Alain Didier Olinga, quant à lui, voit en la société civile une force de proposition et d’expertise, un réservoir d’idées et de compétences techniques, un pôle de vigilance et de contestation par rapport à l’action des pouvoirs publics. Dans cette posture, la société civile aide à l’amélioration de la décision publique, des politiques publiques, de la gouvernance. Elle est un vecteur de transparence et d’efficacité. En ce sens, elle est tournée vers trois directions : vers l’international, vers l’Etat, vers les populations à la base.

La société civile peut donc s’envisager comme :

  •  Un lieu d’apprentissage de la citoyenneté et de l’intégration sociale dans un contexte de crise des institutions traditionnelles (famille, école, entreprise) qui étaient des espaces de socialisation ;
  • Un appareil de dynamisation du développement en contexte de décentralisation
  • Une plateforme du dialogue autour des politiques de développement, dans le cadre du développement participatif ;
  • Un levier de création de richesses et, ipso facto, de réduction de la pauvreté par le truchement d’un partenariat d’approche participative au développement ; En effet, la décentralisation et le développement local sont au service de la réduction de la pauvreté et de la création des richesses.
  • Un instrument de lobbying et de plaidoyer au plan technique et opérationnel.

Des défis majeurs

  • La faible structuration et organisation des associations (elle devrait s’organiser beaucoup plus en fédérations ou coalition des différents corps sociaux pour ne pas dupliquer inefficacement les activités et les projets ;
  • Les méthodes d’action sont à renouveler et à adapter sans cesse ;
  • Les activités ponctuelles y sont nombreuses et de faible portée ;
  • La faible conscientisation sur son bien-fondé ;
  • La formation insuffisante des acteurs
  • Une capacité managériale insuffisante :
  • Une absence de politique de communication ;
  • Une dépendance quasi morbide vis-à-vis des financements extérieurs.

Quoiqu’il en soit, la société civile offre l’espoir d’une alternative citoyenne. Le PDPP (Plan de Développement pour les Peuples Pygmées) lancé le 15 juillet 2013 à Kribi nous introduit au MAPAPPY (Méthodologie d’approches participatives des populations pygmées), un outil qui permet de renforcer le consentement libre et préalable des bénéficiaires, notamment en offrant des formations au personnel afin de permettre une meilleure imprégnation des différents acteurs de la culture des peuples et une harmonisation des approches en matière d’accompagnement des populations pour un développement local durable.[vi] En gros, il y a un sentiment du travail accompli. D’ailleurs, l’Institut National de la statistique relève 3513 microprojets réalisés à environ 40 millions de FCFA ayant permis d’améliorer les conditions de vie de plus de 2 millions de Camerounais vivant en zone rurale.[vii]

Elle peut se constituer protagoniste dans la résolution de conflits et la gestion pacifique des crises et autres allergies sociales. Des résultats fructueux pour la paix sociale et la stabilité ont déjà été enregistré en Afrique de l’ouest (Voir Lucien Ayissi).

Du fait que les associations sont de libres regroupements de citoyens dans une République, elles doivent être organisées et doivent fonctionner démocratiquement. La coopération entre les associations locales devrait primer sur la coopération de chacune d’elle avec les bailleurs de fonds extérieurs, comme le suggère Fabien Eboussi Boulaga. Elles devraient s’abstenir de mendicité notoire, du misérabilisme et du complexe de dépendance. Parce que les membres des associations sont des citoyens avec des droits et des devoirs, ils ne sont pas de simples courroies de transmission ou des hauts parleurs des politiques gouvernementales ; ils ont la responsabilité de négocier en permanence et en contrepoids avec l’Etat, pour des compromis tout en se gardant de compromissions. Chaque association de la société civile est aussi appelée à faire son audit annuel et à nouer des relations avec des associations similaires transnational ou trans- étatique.

  1. Engager une diplomatie de proximité pour l’annulation des dettes envers les pays partenaires du Cameroun, pour un large réinvestissement dans les projets de développement local.
  2. Nécessité pour les communes de créer de la croissance et des emplois au niveau local.
  3. Importance de l’entretien des infrastructures et surtout prise en charge des acquis du PNDP par le gouvernement pour un développement durable effectif.
  4. Envisager avant tout un travail de sensibilisation et de mise en confiance des paysanneries.
  5. Briser les préjugés qui entourent le monde des pygmées dans l’imaginaire collectif par un réel travail de communication interculturelle.
  6. Etablir un environnement et un climat propices à la collaboration et à l’action communautaire et civique.
  7. Faire travailler des groupes d’intérêts parfois opposés et des leaders quelquefois concurrents vers les intérêts collectifs des communautés concernées.
  8. Rendre le leadership de service une priorité pour les administrations publiques.
  9. Instiguer au respect des délais de l’Agenda setting dans la réalisation des travaux d’aménagement ou de réhabilitation des ouvrages.
  10. Sensibiliser, former, mobiliser et anticiper sur les évolutions à venir.

Depuis 1990 et l’orée des processus de démocratisation en Afrique, les Etats africains sont amenés à appliquer la bonne gouvernance et la participation citoyenne à la gestion des affaires publiques. Il importe de procéder de manière régulière à l’évaluation de la pratique de cette bonne gouvernance, notamment au regard de l’action de la société civile dans les différents champs du plaidoyer au développement. Le Contrôle Citoyen de l’Action Publique (CCAP), s’il n’est pas du tout une invention récente, se présente néanmoins à l’heure actuelle sous une forme constituant une rupture majeure d’avec les pratiques habituelles. En effet, le modèle républicain de l’Etat prévoit que celui-ci ait une orientation populaire de la souveraineté et mette l’intérêt général au centre de son action. En vertu de la séparation des pouvoirs, le parlement et le pouvoir judiciaire sont chargés de contrôler l’action du pouvoir exécutif. L’un au profit du peuple et l’autre au nom des grands principes de justice et d’équité. Mais pourquoi donc pratiquer le CCAP ? Cette interrogation en soulève beaucoup d’autres liées à l’effectivité des mécanismes démocratiques. Pourquoi les citoyens doivent-ils s’impliquer dans le suivi de l’action publique/gouvernemental alors que plusieurs mécanismes de contrôle existent déjà ? À l’heure du tout archivé, de la transparence accrue et du fact checking, c’est-à-dire, la vérification quasi-instantanée des faits médiatisés, la société civile impose aux politiques un devoir continu de redevabilité. Justement, les organisations africaines de la société civile sont bien décidées à tendre l’oreille à ce qu’annoncent les candidats, et cela bien au-delà des campagnes électorales. Ainsi, il ne suffirait plus de passer le cap des scrutins pour dormir sur ses lauriers électoraux, sur tel ou tel trône, rétorquant aux plus pointilleux que la realpolitik impose des entorses aux promesses. La redevabilité sociale et le contrôle citoyen constituent un rouage démocratique qui permet de rapprocher de manière collaborative les citoyens et leur gouvernement.

Alain Cyr Pangop Kameni, crisologue


[i] Dans cette étude de 265 pages, l’auteur passe en revue les politiques de développement initiées en « Afrique noire » au lendemain des indépendances. Il démontre que les actions de développement initiées depuis le sommet ne cadrent que maladroitement avec les réalités des paysanneries. En effet, les discours sur le développement sont devenus au fil des ans le passe-droit d’une idéologie de la sujétion et de la dépossession des masses travailleuses qui travaillent toujours plus sans que leur condition ne soit pour autant améliorée. Il y a, en son sens, une mise en tutelle de la paysannerie qui débouche sur une spoliation du petit agriculteur. Et le résultat non moins logique est que l’on aboutit à des échecs répétitifs de toutes les initiatives de développement plus que centralisées. Seulement, au lieu de poser le doigt là où ça fait mal, les gouvernements jouent le jeu de l’évitement et devient le débat sur le champ des schémas fétichisés qui entérinent presque les mythes coloniaux du nègre, être inférieur et inapte au développement. On culpabilise, à tort bien sûr, les « modèles culturels des sociétés ethnologisées »

Pour Éla, il faut rompre avec les représentations du monde rural  produites par l’imaginaire dominé par les « schémas fétichisés qui justifient les interventions modernistes et les pratiques technicistes en évacuant les phénomènes de pouvoir et les clivages internes aux sociétés postcoloniales » (P253) Il existe un interventionnisme exacerbant de l’Etat dans les zones rurales qui traduit davantage une recolonisation de l’Africain par l’Africain que le désir  d’améliorer les conditions des paysans affiché dans les discours officiels. On aboutit à une situation où « l’argent n’abonde pas nécessairement entre les mains de ceux qui travaillent dans les conditions très dures avec les moyens limités », surtout que les paysans « travaillent pour nourrir d’abord ceux qui vivent à l’ombre du pouvoir » (256). La dépossession est autant économique que métaphysique. Même au niveau de l’organisation et de l’orientation des techniques culturales, autant que des types de cultures à pratiquer, l’Etat se fait la tête pensante exclusive, et ne laisse aucun espace de libertés où les groupes de base peuvent s’organiser et affirmer leurs droits autant que leurs besoins réels. On s’imagine que la modernisation est la voie du développement et ne s’occupe plus qu’à mesurer la réceptivité des paysans aux innovations modernes. Pourtant, au lieu d’étouffer ce que les gens du village savent, il faut peut-être s’efforcer de réinventer « la rationalité venue du dehors à partir des logiques locales ». Il serait absurde d’importer des « paquets techniques », et « d’acheter le développement » sans penser  « la réappropriation des technologies » par les populations locales. En effet, « pour être performants, les outils de pointe doivent avoir l’adhésion des populations qui, sans cela, n’ont pas d’autres langages pour s’exprimer que la résistance passive ou le sabotage » (257)

Le développement local doit au final aller au-delà de la simple décentralisation car « il ne s’agit plus de décentraliser les instances de pouvoir au niveau régional ou local. Il faut construire une société où les classes au pouvoir renoncent à pourchasser les acteurs et les groupes opposés à des systèmes d’exploitation organisés » (261). Repenser les problèmes du développement en Afrique suggère que l’on désacralise l’espace du politique autant que celui de l’archaïsme et de l’arbitraire. L’Etat doit renoncer à proférer des « paroles de révélation » pour mettre en valeur les énergies qui se perdent en marge des cadres culturels et institutionnels. Si l’Etat doit pénétrer en brousse, il ne doit finalement pas le faire avec des recettes toutes faites, mais plutôt  avec un esprit ouvert aux propositions villageoises car à la vérité, et Senghor l’a dit en parlant des paysans, «  Quand on leur demande ce qu’ils veulent, ils n’hésitent pas (…) Ces gens, de tout temps, se sont battus contre la sècheresse. Ils ont besoin qu’on les aide, pas qu’on pense pour eux » (cité par Éla 1990 :139)

[ii] On voit d’ailleurs que comme dans le plan paysan, la culture du cacao et du café semble une préoccupation majeure à Salapoumbe à l’est par exemple, Les Echos du PNDP rapporte qu’au 20 mai 2014, un pygmée, Fidèle BENA, un cacaoculteur, recevait la médaille du mérite agricole. Cette distinction montre qu’aujourd’hui encore le cacao occupe une place maîtresse dans la politique de développement rural du Cameroun. Pourtant, beaucoup de chercheurs africains montrent l’incapacité pour l’Afrique de se développer avec « ces produits de traite » (voir POUGALA, Géostratégie africaine 2016). On se souviendra que la crise avait déjà, par le passé, poussé plusieurs agriculteurs à tout simplement déraciner ces plantes pour cultiver des produits vivriers afin de se nourrir. De même, même si l’on parvenait à atteindre une production importante, la commercialisation poserait encore un problème aussi bien au niveau de l’acheminement des récoltes que des prix pratiqués. Éla le disait avec brio, «  les paysans reçoivent d’en haut le prix de « leurs produits » et doivent s’y conformer le jour du marché fixé par l’Etat » (1990 :145). Les paysans sont soumis à une double dépendance ; non seulement par rapport à l’étranger, notamment par le marché mondial, mais aussi par rapport à l’Etat et aux catégories nationales privilégiées qui en contrôlent les appareils.

Pour terminer, l’Administration a hérité de la colonisation, et même des gouvernements postcoloniaux cette image d’ « instrument de sujétion de la paysannerie » à travers la collecte des impôts. Cette image est malheureusement encore très présente dans la conscience collective et fait que les paysans n’abordent les projets du « Ngomna » qu’avec suspicion et frilosité. Peut-être que le véritable défi du développement local est d’abord celui de la mise en confiance des paysanneries. Éla relevait pour le décrier le fait que beaucoup de discours étaient faits sur l’agriculture comme pilier du développement en même temps qu’on consacrait au secteur moins de 10% du budget de l’Etat. Il semble peut être important aujourd’hui dans le cadre de la troisième phase du PNDP, de rectifier le tir non seulement en allouant un budget conséquent au secteur, mais aussi en promouvant véritablement le mérite sans clivage.

[iii] Pour qu’un projet de développement soit inscrit au BIP via un département ministériel, il suffira qu’il bénéficie du soutien d’une personne influente, couramment appelée « élite », soit par calcul politique, soit pour se positionner dans la société, soit tout simplement parce qu’il veut profiter son groupement d’origine d’une opportunité. La chaîne qui permettait auparavant de consulter le comité de développement au niveau de toutes les circonscriptions administratives et de faire remonter les problèmes à la base est rompue depuis plus de 20 ans. Plusieurs comités de développement marginalisés ne fonctionnent plus ; et là où ils s’efforcent encore de tenir des réunions pour organiser des actions de développement, on constate que les problèmes choisis dans ce cadre ne figurent pas par la suite dans le cahier de projets retenus pour être financés par le BIP. Des communes d’arrondissement se sont souvent plaints de n’avoir pas été associées aux transferts et gèrent par conséquent de maigres budgets qui ne correspondent pas toujours aux besoins de la base. Des agents municipaux décrient parfois les différends entre eux et les responsables nationaux, ainsi que les lenteurs administratives. On relève le manque de collaboration franche entre les maires et les services déconcentrés de l’Etat, titulaires de l’expertise dans l’exécution des projets BIP.

[iv] Cf. L’Ere du temps n°36 février –mars 2017, p.11.

[v] Plusieurs localités répercutent les réalisations comme indicateurs des performances :-Au village Tsongo le CC a initié l’ « opération un ménage une latrine » tout comme il a désigné une commission pour s’assurer de la propreté des cuisines et qui sanctionne les femmes indélicates. Il existe aussi une caisse de solidarité pour aider à faire des économies qui sont mises à portée des populations en cas de besoin.

-Au village Zakan le CC s’est organisé en sous-commissions affectées à des tâches précises. Celle chargée de l’eau collecte 500frs pars mois et par ménage pour l’entretien du forage communautaire.

– c’est aussi le cas à Olong où le COGES porte le développement local. Au point d’eau, une gestion optimale intègre que tous les utilisateurs se déchaussent avant d’avoir accès au forage et qu’une fontainière s’assure que seuls les ménages contribuant au fonds pour l’entretien du point d’eau accèdent à l’eau. Cette dernière confie que sa tâche n’est pas de tout repos. Elle a souvent été battue mais elle tient bon.

-À  Evodoula, c’est l’investissement dans la jeunesse qui retient l’attention. Le village a construit une école maternelle en matériaux provisoires avant d’être assisté par la commune qui en a cimenté le sol.

– À la municipalité de Nguibassal le cercle municipal est un morceau de la ville qui égaie le village. Ici, l’hôtel de ville dispose d’une grande salle de cérémonies et d’un restaurant ainsi que d’un téléviseur. Cet espace chasse le dépaysement, de l’avis de ses usagers, de même qu’il constitue une source de revenus pour la commune. En même temps, il a permis à retenir les jeunes enseignants à leur poste de travail.

-Le village Mekom se démarque par l’entretien de ses ouvrages hydrauliques. Un puits à motricité humaine y a été construit il y a 3 ans et n’est jamais tombé en panne. 2 facteurs ont contribué à cela : l’usage de la pompe est strictement interdit aux enfants et la technique de pompage prescrite par le COGES est strictement respectée. De même, les heures d’ouverture et de fermeture sont respectées et pour l’entretien, chaque ménage verse 250frs/mois.

– À Koupa, les populations sont au cœur de la création et de la gestion d’un lycée. Ainsi, elles paient les ¾ des salaires des enseignants. Cette population a aussi fait le remblai à mains nues de 2km de route  sur le tronçon Njika-kagma avec de la latérite.

– À Koutaba, c’est l’hygiène et l’organisation du marché qui sont signalées. Ce sont les commerçants qui sont au cœur de chaque activité, appuyées par le COGES. Chaque mois, chaque commerçant verse 500frs pour payer les vigiles. Il reste quand même la difficulté à avoir une électrification fiable ; c’est dans ce cadre que le COGES a saisi la commune.

– À Nkong Ngam c’est le développement intégral qui est visé à travers la production du compost. Le PNDP leur a offert 5 vaches qu’ils travaillent à entretenir pour assurer leur reproduction et en tirer de la bouse qui sert à fertiliser les sols. Cette localité de Bangangté semble bien y réussir car le nombre de vaches est désormais de 20. Le village fait des avancées notoires dans l’agriculture bio en s’appropriant le projet de Gestion durable des Terres (PGDT) du PNDP.

– À Magba la protection de l’environnement se fait pratique avec le projet de forêt communale.

– À Baligham le chef Galabe II catalyse le développement de sa localité à travers un « clean up campaign » pour l’entretien de la route principale du village. On parle ici de 7.4 km de route réhabilités  et qui aident la population à évacuer ses produits.

– À Mikokov and Nsom, l’électricité booste l’économie locale : plus de Kumba Break produits pour un boulanger du coin, un petit élevage lancé par une villageoise et même de meilleurs résultats pour les élèves. Pour avoir accès à l’électricité, chaque ménage n’a déboursé que 15000frs CFA.

– À Bakingili,  l’eau est accessible à tous et la contribution réglée. Ceux qui n’ont que des robinets payent 1200frs/an tandis que ceux qui en plus ont des douches versent 5000frs/an. Mais tout n’est pas rose pour le COGES. Certains pensent que “Water provided by government should not be paid for”. Divers problèmes ont amené le PNDP à suggérer que le COGES établisse d’autres règles de gestion qui prennent en compte l’avis de tous et de chacun.

– À Yoke, le Garri Market a été construit et les membres du COGES y travaillent à donner la priorité de l’occupation des boutiques aux populations locales. Leur ambition est que ce marché devienne le point focal de la distribution du tapioca dans le Sud-Ouest. Il reste que l’entretien et l’électrification ne sont pas encore assurés. La commune de Muyuka est d’ailleurs sollicitée par le COGES dans ce sens.

– À Sockelle 2 dans le littoral, l’entretien du forage communautaire est une priorité. Ici, seuls les hommes y puisent de l’eau.

– Au village Mbanlé toujours dans le littoral, l’ambition est grande mais l’action ne semble pas suivre. Ici, sur 22 foyers seuls 09 versent leur contribution pour l’entretien du point d’eau. Le COGES ici doit encore tabler sur la sensibilisation. [Echos du PNDP n°13 Juillet-août-septembre 2016]

[vi] Les centres d’intérêt ici sont l’éducation des pygmées qui en plus d’être difficile car beaucoup d’entre eux finissent toujours par se laisser happer par « l’appel de la forêt » et à quitter les bancs, est jonchée des difficultés comme un environnement plein de moutmouts ou encore le manque d’électricité et des outils pédagogiques. À côté de ces difficultés, quelques succès : 11 Baka au secondaires à Messamena, à l’Est, résultats de trois ans de travail du PNDP. Au sud, les examens d’entrée en 6e et du CEP sont un franc succès pour les candidats pygmées qui ont fait 100%. Même s’il reste que la route de l’ecole est un réel calvaire pour les fils Bagyieli qui doivent parcourir 7km pour se rendre au lycée. Il faut en effet un appui plus grand du PNDP pour ces populations pygmées. Les agents du PNDP et les autres acteurs déplorent un manque de modèles sur qui les plus jeunes peuvent prendre exemple. En effet, beaucoup de Baka s’intéressent déjà aux études. En 2015, ils étaient 1300 à être inscrits, avec 300 d’entre eux scolarisés grâce aux frais du PNDP avec l’exonération des frais d’APEE et l’octroi des fournitures scolaires. 2 d’entre eux ont été invités à faire partie des députés juniors en juin 2015. On compte désormais des pygmées admis à l’Ecole des Infirmiers diplômés d’Etat –c’est le cas d’Honoré Dinawe, bachelier ; Joseph Bibi technicien de laboratoire, spécialiste des analyses médicales ; Manzo’o Ana Maria infirmière Bagyieli. Mais la note du ministre des enseignements secondaires interdisant aux candidats admis aux candidats admis dans les ENIEG, sur dérogation spéciale, de se présenter à l’examen de fin de formation semble avoir des effets négatifs sur certains Baka pourtant très studieux. C’est le cas de Ngombo Isaac, qui déprime depuis lors et ne souhaite plus que retourner auprès des siens. Au-delà du secteur scolaire, celui de l’agriculture offre aussi des possibilités de développement chez les pygmées, eux qui hier vivaient de la chasse et de la cueillette commencent à s’intéresser et même à exceller dans l’agriculture. À Salapoume à l’Est, ce sont 400 plantations qui ont été créées par les Baka avec l’aide du PNDP. Appuyés aussi bien par le ministre des affaires sociales que par les autorités administratives comme le délégué départemental de l’agriculture et du développement rural pour l’Est. On aura eu le 20 Mai 2014 le couronnement de Fidèle Bena, cacaoculteur pygmée, médaillé du mérite agricole. Mais les succès n’obstruent pas les difficultés. Il y a d’abord les conflits entre les Bantou et les Pygmées au sujet des terres et la difficulté pour ces populations à acheminer le produit de leur récolte dans les marchés proches et ceux de la capitale. D’où le plaidoyer de Mme Ngo Mandi du village Makot à l’Est pour plus d’appui. Comme elle dit, leur abondante production pourrit dans les champs faute de moyens logistiques de transport de celle-ci vers les marchés proches et de Yaoundé.

L’aspect sanitaire est exposé, avec une mission de renforcement des capacités de la médecine traditionnelle en apportant une formation additive aux praticiens locaux. Ici aussi on ne manque pas de résistance, les femmes ayant encore peur d’abandonner leurs enfants aux soins « d’une infirmière étrangère ». De l’avis des accoucheuses ayant suivi la formation du PNDP, il y a eu une baisse de la mortalité infantile et maternelle. La formation leur aura permis de faire la part entre « les cas normaux et ceux qu’il faut référer au centre de santé ». À côté du sanitaire, le service d’état civil œuvre à établir les actes de naissance des enfants Baka qui n’en disposent pas toujours.

Une autre difficulté est celle de briser les préjugés qui entourent le monde des pygmées dans l’imaginaire collective. Dans plusieurs esprits en effet, un village comme Mikel par exemple est toujours perçu comme « le plus grand village des sorciers d’Afrique centrale », comme le déclarait jadis le journaliste gabonais Patrick Nguéma Ndong. Ecarter de tels préjugés demande encore un réel travail de communication interculturelle. On le sait, les préjugés éloignent toujours les acteurs des préoccupations véritables des populations. Il est à signaler qu’à l’opposé des Bantous, chez les Baka ce sont les femmes qui commandent, ces composantes culturelles devraient être prises en compte dans tout projet visant à développer les peuples pygmées. Dans le plaidoyer des acteurs sur le terrain, la gratitude est suivie de près par le désir d’un plus grand appui notamment avec plus de finances. Pour George Nkam, spécialiste des aspects socio-environnementaux à la cellule nationale du PNDP, « il faut envisager une discrimination positive pour les peuples pygmées ». Il sera aussi question de « préserver la savoir, le savoir-faire et le savoir être des pygmées » dans toute initiative de développement durable, que tous les appuis se placent toujours dans le prolongement de ceux qui existent déjà, en l’occurrence dans le domaine de la pharmacopée traditionnelle. [Echos du PNDPn° 010 oct-nov-déc 2015]

[vii] Le n° 007 jan.-fév. mars 2015 des Echos du PNDPdresse le bilan des 10 ans du PNDP (2004-2014) ; un bilan plutôt satisfaisant selon les bénéficiaires.Les principaux résultats étant :

– l’élaboration et/ou l’actualisation de 329 PCD, la construction de 739 salles de classes, 1457 points d’eau, 28 centres de santé intégrés, 306 km de pistes rurales et de 10 ouvrages de franchissement, 12, 46 km de moyenne tension et 27, 91 km de basse tension ;

– un projet de gestion des plantes médicinales ayant permis de former 900 personnes aux techniques d’inventaires de ces plantes et 800 plantes ont été répertoriées ;

– le projet de gestion durable des terres et des systèmes agro–sylvo-pastoraux a permis la mise en œuvre de 293 microprojets dans les régions du Nord, de l’Adamaoua, du Centre et de l’Ouest.

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